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Cecilia Cosci, renaissance contemporaine

Il y a quelques mois, nous avons poussé la porte de l’atelier d’une artiste florentine et depuis, nous sommes obsédées par son travail. La beauté de l’image, la puissance du message, la liberté totale de la démarche, le jeu avec les codes du classique dans un respect presque mystique… Bienvenue dans l’univers de Cecilia Cosci.

Son parcours & les prémices

Cecilia Cosci est originaire de Florence. Elle trouve déjà très tôt du réconfort dans la peinture et adore jouer avec les couleurs mais ses parents insistent pour qu’elle suive un parcours scientifique au lycée. Elle finit tout de même par faire des études en histoire de l’art à l’Université de Florence, qu’elle termine par une thèse sur l’art conceptuel. Jeune femme, elle vit dans le quartier de San Frediano (un lieu qui l’inspire beaucoup), dans la maison de sa grand-mère, où elle passe pas mal de temps à créer. Elle commence à utiliser les cadres de sa grand-mère pour ses compositions artistiques, associant des images glanées ici et là et des cartes postales. 

Une fois diplômée, Cecilia travaille pendant 4-5 ans pour Giunti, une maison d’édition d’art renommée, où elle s’occupe de dossiers artistiques. C’est durant cette période qu’elle commence à collecter du matériel de toutes sortes, conservant des communiqués de presse et des revues du monde entier. Elle ne le sait pas encore, mais elle récolte alors le terreau qui lui servira de base de travail près de 20 ans plus tard.

Au bout de quelques années, Cecilia se tourne vers l’enseignement. Elle enseigne l’histoire de l’art au lycée, trouvant une nouvelle forme d’inspiration en racontant les œuvres qu’elle adore aux jeunes. Au contact des étudiants, chaque cours est une redécouverte pour elle, lui permettant de réinterpréter et d’actualiser sa vision des œuvres classiques.

Par ici la dose hebdomadaire de sagesse italienne !

Cecilia Cosci

Solitudine, 2019

Angelus Novus, 2024

Le moment de bascule

Le véritable tournant pour Cecilia survient il y a quelques années, à la mort de son père, la laissant orpheline et perdue (sa mère était décédée quand elle n’avait que 17 ans). C’est alors qu’elle se tourne de nouveau vers l’art et recommence à utiliser ses mains, en faisant des collages, une activité qui, selon ses dires, sera une véritable bouée de sauvetage. Son approche artistique est née d’un besoin urgent de s’exprimer. Une nuit d’insomnie, elle réalise son premier collage, une composition créée en 30 minutes qui semble guidée par une force intérieure. 

Avec ses premières réalisations, elle va voir le directeur des Offices, qui reconnaît immédiatement son talent et l’encourage à poursuivre. À ce moment-là, Cecilia a besoin d’une forme de validation de la part d’une figure d’autorité dans le domaine de l’art. Même si elle a toujours su au fond d’elle qu’elle était artiste, elle trouve ce mot chargé de sens et d’engagement. “C’est plus simple, je trouve, de se présenter en disant “je suis peintre ou je suis sculptrice” que de dire “je suis artiste””. Toutefois, à travers ses œuvres, elle s’accepte peu à peu comme telle, trouvant une force dans sa sensibilité et sa vision unique. Et même si son projet actuel semble arriver sur le tard, les prémices datent de très tôt dans la formation de son esprit. “J’ai revu un ancien ami dernièrement qui m’a rappelé qu’à l’adolescence, je créais des petites BD en réinterprétant les personnages de l’antiquité. J’avais oublié, mais aujourd’hui en remettant toutes les pièces du puzzle ensemble, j’ai compris que tout avait en fait un sens depuis le début”.

Technique et démarche artistique

On l’a dit plus haut, Cecilia utilise une technique communément appelée collage, mais la nomme encore plus précisément et plus justement “montage”, car elle crée des compositions homogènes où les différentes images s’assemblent et se fondent pour former un nouvel ensemble cohérent. L’assemblage ne se voit pas à l’oeil nu. Le collage, a contrario, a un côté plutôt volontairement déstructuré et les éléments collés se voient nettement. 

Elle associe entre eux des éléments picturaux venant des grandes oeuvres de l’histoire de l’art (Caravaggio, Da Vinci, Pontormo -qui est un de ses préférés-, …). Ses montages commencent souvent par une image qui attire son attention, qu’elle extrait de son contexte original pour lui donner un nouveau sens. De temps en temps, elle a aussi une idée précise d’un concept ou d’un message et attend de tomber sur les bons éléments picturaux pour la créer. Parfois, l’inspiration vient rapidement, parfois, cela prend des années. Le processus est rarement linéaire, impliquant souvent un saut dans l’inconnu. La magie opère lorsqu’elle trouve l’association parfaite, cela provoque une joie indescriptible en elle.

La chose magnifique qui la surprend le plus, en sortant une image de son contexte, c’est que parfois, il lui suffit de faire une très légère rotation pour lui faire prendre une toute autre dimension, c’est incroyable. Ça nous permet de comprendre à quel point le contexte est important et dit beaucoup. “ Une amie m’a dit à propos de ma Joconde que quand elle voit mon montage et qu’elle retourne voir l’originale, l’originale a pris une nouvelle valeur, elle lui semble être devenue encore plus Joconde ! ». 

Il principio di Archimede, 2019

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Babette, 2020

Resistenza, 2022

Girotondo, 2020

Thèmes et inspirations

Les Femmes 

Les personnages féminins sont centraux dans les œuvres de Cecilia. Elles représentent la résistance, la force cachée sous une apparente faiblesse (que la société veut bien en donner à voir). Un bon exemple est celui de son œuvre Babette. Dans son montage, avec sa présence imposante et obscure, cette femme de dos remplace la figure du Christ lors de la dernière cène. Babette lui rappelait sa nonna et toutes les femmes qui ne mangeaient pas à table, qui cuisinaient, servaient les hommes, les enfants et petits-enfants et restaient à proximité et à disposition. “Mais si ma nonna restait à l’écart du repas, elle en était en fait la PROTAGONISTE, et ça, c’est un peu le fondement des femmes. Elles ont l’air d’être à l’ombre des hommes, mais sont en réalité la force. Et moi, je n’ai plus envie de faire semblant d’être faible.”

 

La relation homme/femme

Si Cecilia aime communiquer sur la grande force des femmes, elle aime aussi mettre en avant la possible faiblesse des hommes. “Pourquoi les hommes ne peuvent-ils pas faire voir plus de faiblesse”, questionne-t-elle ? De manière générale, le rapport de force et les relations entre les sexes masculins et féminins l’intéressent beaucoup et elle en joue. Je pense par exemple à son oeuvre “La grande donna dietro al grande uomo” (2 de Pontormo) où cet homme ne sait pas que cette femme gigantesque est derrière lui. Il y a aussi le montage intitulé Altalena, montrant 1 homme accroché à une sorte de Super Woman.

Ou encore la femme dont la tête sert de marche pour l’ascension d’un homme, mais à la fin, ce qui ressort du tableau, c’est qu’elle résiste !

 

La foi

Cecilia interroge également son rapport à la foi. Ayant grandi dans une famille catholique, elle était très croyante petite, habitée d’une certaine ferveur. Comme beaucoup, à l’adolescence, elle a changé car elle se sentait trop différente et a commencé à étudier la philosophie qui questionne tout… puis sa maman est morte et elle s’est vraiment éloignée de la foi. Elle a alors connu des périodes de doute immense et de grande remise en question. Elle n’a jamais retrouvé la foi qu’elle éprouvait enfant. Son œuvre reflète cette quête et décrit le manque, l’absence du divin, le besoin de trouver des réponses qui n’arrivent pas.

 

L’ironie

Je terminerai par l’ironie, qui n’est pas vraiment un thème mais plutôt un fil rouge de son oeuvre. Elle est un élément essentiel de son travail, permettant de traiter des sujets graves avec la légèreté nécessaire pour ne pas sombrer dans le tragique. Même si Cecilia avoue aimer mettre une pointe de drame, de tragédie dans ses montages, car cela fait partie d’elle, elle juge nécessaire de contrebalancer avec l’ironie, qui est fondamentale, sinon la vie serait insoutenable.

 

Une renaissance contemporaine

L’art de Cecilia Cosci représente une fusion unique du passé et du présent, ses montages offrent une nouvelle perspective, une autre lecture des œuvres d’art classiques, les réinterprétant pour les adapter à notre époque contemporaine. Cecilia Cosci réaffirme le rôle vital de l’art en temps de crise (personnelle ou communautaire) et de renouveau. Son parcours, de l’enseignement à la reconnaissance artistique, témoigne de la puissance de sa créativité et de sa résilience.

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I giganti cercatori, 2019

Preghiera, 2019

Par Emilie Nahon

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