BOBINE

BOBINE #6 Jouer à l’italienne

Salut les adoré(e)s !

Il y a quelques temps, j’ai demandé à ma communauté si elle avait des thèmes à me suggérer pour mes bobines. J’ai été inspirée par un thème en particulier, celui de me sentir – ou pas – vraiment italienne après 15 ans passés en territoire toscan.

Le thème est très vaste, mais je le trouve intéressant car il touche mille pans de mon quotidien. En voici un petit aperçu divisé en 2 catégories tout à fait originales : ITALIENNE et PAS ITALIENNE POUR UN SOU.

J’ai prévenu.

ITALIENNE

La créativité et la quête permanente de la beauté sont peut-être les thèmes qui me rapprochent le plus de mes compatriotes. En Italie, on sent partout une émulation créative et un certain sens de l’esthétisme. Le rapport au beau est tout à fait fascinant (il me semble qu’il est inculqué dès la naissance) et impose une sorte de règle suprême : on ne supporte pas ce qui pourrait être moche, ce qui pourrait être dissonant ou perturbateur à la vue ou aux oreilles. J’adore cette exemple très simple : en Italie, on crée même des règles de grammaire particulières quand quelque chose « sonne mal ». Il faut que ce soit fluide, que ce soit mélodieux.
J’aime aussi beaucoup que la créativité soit omniprésente et touche tout le monde, sans snobisme. Bien sûr, il y a le « Salone del Mobile » à Milan, chicissime, et on retrouve cette notion du beau exacerbée dans l’architecture, les arts, la mode. Mais personnellement, je trouve qu’elle touche tous les foyers dans la manière de cuisiner, dans l’art d’aménager son chez soi ou de penser son quotidien.

La beauté, partout, tout le temps.

Le style est aussi un lieu fort d’italianisation pour moi. Sans aller jusqu’à m’habiller en full-Pucci-bleu-ciel-accessoires-compris (la ref est réelle), j’ai piqué beaucoup de choses à force d’observer ce qui m’entourait.

  • L’importance des beaux accessoires griffés ou non (passion vintage)
  • La recherche d’une forme d’élégance. Je préfère désormais à 40 ans que l’on me trouve élégante plutôt que stylée.
  • Ma quête des plus beaux motifs pour mes jupes plissées genoux accompagnées de petits talons pour allonger la gambette.
  • Mon envie de bien m’habiller pour sortir, même si c’est pour aller à la pizzeria (no sloppy day!)
  • Sortir mes bijoux même pour passer acheter un bout de schiacciata à la boulangerie (j’adore les mamies avec leurs 3 carats qui pendouillent à chaque oreille devant le stand de kiwi).

Je crois que ce qui me plait dans le style italien c’est avant tout la joie qu’il dégage, sans se prendre trop au sérieux. Une faute de goût dans l’association des couleurs ? Pas bien grave. J’en fais trop pour aller boire une bière ? Tout le monde s’en fou. Pour être tout à fait sincère avec vous, je ne suis pas très fan du style français et de son côté mal-peignée-restons-faussement-simple-mais-j’ai piqué-le-birkin-de-maman. Je préfère le côté assumé très / trop apprêté des italiennes qui ne font pas semblant d’être cool. Ça d’ailleurs c’est rigolo, le mot « cool » colle moyennement aux italiennes, ce n’est pas trop leur créneau (cool en Prada est-ce vraiment cool ? Vous avez 2 heures).

(rappel : chacune fait ce qu’elle veut, c’est une question de goût. Si vous héritez d’un Birkin, je suis jalouse à crever).

Je crois que j’ai vécu une très forte italianisation quand je suis tombée amoureuse de Forte dei Marmi. Il m’aura fallu des années pour comprendre le charme, les avantages, la douceur di « Un estate al Forte » un été à Forte. Je suis passée d’un lieu que l’on m’imposait avec des enfants en bas âge, à un refuge essentiel à mon équilibre et mon bonheur. Nous y avons construit les souvenirs d’enfance de mes enfants et de mes neveux, j’y accueille mes amies les plus proches en juillet avec un planning millimétré pour que tout le monde en profite, nous l’aménageons pour que la maison soit simple et très accueillante. Mais ma vraie joie, c’est l’hiver, quand je pédale avec mes enfants sur le bord de mer, qu’on s’arrête manger un panini aux palourdes sur les transats pliables que le Bagno Marco cache pour les fidèles clients qui passent par là. Si je dois faire une visualisation positive pour sortir d’un bad mood, je vois toujours les pins, mes pins, à Forte.

Je ne parle pas, je hurle. Enfin c’est ce que me dit ma soeur depuis toujours. Comme j’ai épousé un italien ULTRA bruyant (jamais vu une personne faire autant de bruit quand il rentre dans une pièce, le téléphone à la main, en tapant du poing sur la table car un truc ne lui va pas etc), j’ai finalement l’air très soft. Mais sortez moi de mon contexte italien et on me dit souvent que je m’agite trop en me demandant techniquement de baisser le volume.

Je vénère le small talk à l’italienne, c’est une des premières raisons qui m’ont fait tomber amoureuse du pays. J’adore cette idée d’échanger avec gentillesse avec les gens autour de soi, d’avoir une attention, un petit mot, envers la mamie que l’on croise tous les jours. Si je devais vous donner un exemple concret, et bien laissez-moi vous parler du DUO qui fait la joie de mon quotidien, Silvana et Gianfranco, mes maraichers. C’est bien simple, rien que pour eux, je ne pourrais plus déménager. J’y vais 2 à 3 fois par semaine : 10% pour acheter les 2 légumes qui manquent à ma recette, 90% pour échanger et rire avec eux. Ce n’est pas compliqué, on finit toujours plié en deux et pour moi, ça n’a pas de prix.

Vivre au rythme des saisons, c’est un truc que j’ai appris à mieux faire en Italie. Que ce soit pour les fruits et légumes où l’on fête – vraiment – l’arrivée du produit star du mois, mais aussi les variations des saisons au cour de l’année. Je me dis que je suis peut-être aidée par cette grande fenêtre qui donne sur la campagne italienne depuis mon salon, et à travers laquelle j’observe beaucoup plus qu’avant ce qui se passe dehors. Les infinies variations de la nature et de ses couleurs, le chant des oiseaux et la symphonie du printemps. Et puis j’adore l’excessivité italienne en matière de gestion de penderies avec des femmes qui n’hésitent pas à sortir leurs visons le 1er jour de l’hiver, même s’il fait encore 12 degrés au soleil.

Passion exagération toute italienne.

PAS ITALIENNE POUR UN SOU

Mes cheveux n’ont pas passé la frontière et sont restés en France. Je ne sais toujours pas être bien peignée, et je n’ai surtout pas le réflexe italien qui consiste à aller chez le coiffeur dès qu’une occasion de mise en plis se présente (La réunion parents prof de l’école primaire ? BANCO). Voilà, je vous parlais de la française mal peignée au dessus et c’est finalement moi !

Je suis une maman française pour toujours. La véritable mère italienne de la famille, c’est clairement mon mari Andrea (drama queen, excessif, protecteur, la totale). Que ce soit dans la nourriture (quelqu’un veut-il un poisson vapeur et des petits pois ?), dans la gestion des horaires (20h00 au lit les équipes!), dans la façon de les habiller (no brand, no prise de tête), je crois que mes enfants ont été éduqués avant tout « à la française » et j’en suis ravie. Cela ne les empêche pas d’avoir un quotidien entier italien, une grand-mère super qui leur apprend ce que c’est que de manger antipasti-primo-secondo-dolce-caffè à tous les repas et bientôt des chemises sur mesure avec initiales.

Les italiens ont une passion pour l’organisation à la dernière minute. MOI CLAIREMENT PAS. Je ne sais pas combien de familles que nous connaissons ne savent toujours pas le 2 juin ce qu’elles vont faire l’été. « Ah ma magari si va all’Elba da Cristina » Peut être nous irons sur l’île d’Elbe chez Christine. ce PEUT-ÊTRE il me rend dingo car je vis tellemement mieux mon quotidien en sachant comment je vais organiser ma tribu pour que tout le monde soit content. Au final, je ne suis pas encore comme ma copine Lorraine qui vient de booker son ski 2026, mais je réfléchis déjà à Noël prochain. Après, de temps en temps, la souplesse italienne me fait envie, je la regarde de loin, non pas comme une bête curieuse mais comme un objet de tous les charmes. Vivre avec l’inattendu, laisser la place pour la surprise, partir dans en Calabre chez tante Sabrina ! Et puis non en fait, je tachycarde au bout de 2 minutes, cela ne fonctionne pas avec nos caractères.

Je ne me suis pas mise particulièrement à la cuisine italienne. Chez nous, c’est mon mari qui cuisine italien et moi qui prépare les lunch box saines et les légumes. Franchement, je ne sais pas non plus cuisiner français (je suis incapable de cuir une viande, ou de m’imaginer un jour réaliser une blanquette de veau – hahahah – je ris rien qu’à l’idée) mais si on me demande un plat végétarien avec des épices et du lait de coco, je pourrais vous surprendre. Alors ceux qui me lisent depuis un moment vont me reprendre tout de suite en me disant « Et alors Alice ? Tous ces risottos de l’amour ?? » OK, je suis d’accord avec vous, c’est ma seule entorse et franchement il est délice.

Moralité, j’ai l’impression d’avoir fait un mix Franco-Italien tout à fait personnel et je ne me sens pas / plus coincée entre deux cultures qui m’obligeraient à prendre partie. Souvent je suis « la francescina » la petite française de service ici à Florence. De l’autre côté, on me dit à Nice ou Paris que je fais vraiment italienne, et en fait, c’est très bien comme cela.

Je vois souvent dans les médias ou sur les réseaux des gens fantasmer une relation avec l’idée d’une connexion à l’Italie = un arrière grand-père qui y aurait vécu 4 ans, une cousine par alliance dans le Tyrol, tout est bon pour se créer des origines italiennes ! Mais ça, je ne peux en vouloir à personne, le pays s’est construit sur une image si glamour, si liée au bien-être au quotidien, que tout le monde veut une petite part du gâteau.

Je m’étais posée une demi seconde la question de demander la nationalité italienne mais cela ne correspond pas à mes envies. Je me sens profondément fière d’être française, d’avoir des origines normandes, d’avoir grandi sur la côte d’Azur. Je ne me sens pas l’obligation d’en rajouter une couche.

Par contre, grande nouveauté, j’ai ajouté le nom italien de mon mari « Marchi » sur tous mes papiers d’identité. Cela m’a vraiment fait quelque chose d’accoler Marchi à Cheron, j’ai imaginé mon père taper dans le dos de mon mari et ça m’a fait sourire. Cette italianité liée à notre famille me plait par contre, beaucoup.

Je vous embrasse,
Alice

MES QUESTIONS

PASSION QUOTIDIEN. Pour écrire cet article, j’ai du réfléchir à un de mes sujets préférés, mon quotidien italien. Si je devais résumer l’art de vivre ici, c’est vraiment cette idée chaque jour, de vivre plusieurs mini-moments qui mettent en joie. Du coup mes questions sont simples :

Qu’est ce qui fait la joie de mon quotidien ?
De toutes ces habitudes, cette routine, qu’est ce que j’ai transformé en véritables rituels ?

Je lisais il y a peu que la différence entre la routine et les rituels, c’est la conscience que l’on met dans le moment. Je suis bien d’accord. Le café au bar, la discussion avec la voisine, cuisiner un légume délicieux qui vient d’arriver sur les étales… C’est toujours sympa d’identifier les petits moments qui semblent avoir du sens, pour pouvoir s’y rattacher plus fort au moment où je les vis, et absorber tout ce qu’il y a à prendre !

SE SENTIR TIRAILLÉE. Je me suis rendue compte en écrivant qu’il y avait cette idée de tiraillement quand on vit dans un autre pays depuis si longtemps. C’est bête mais je n’y avais vraiment jamais réfléchi comme ça.

Suis-je obligée de choisir ? Puis-je prendre le meilleur de chaque ? Puis-je trouver une place qui soit la mienne et pas une projection de ce que les gens voudraient que je sois / que je fasse ? Est-ce que tout cela peut se faire simplement, sans drama ou prise de chou disproportionnée ? 

L’Italie, si proche de ses cousins français, amène quelque chose d’absolument inédit à ma vie. Elle l’a rendu plus riche, plus curieuse, plus passionnée aussi. En plus de cette dualité France/Italie, j’ai aussi la dualité Normandie/French Riviera. Autant vous dire, 2 salles, 2 ambiances ! En grandissant, je n’ai personnellement jamais eu de problème avec ça mais j’ai vu dans les yeux normands, le fantasme de la Côte d’Azur et la projection que cela pouvait avoir sur nous en temps que famille. Je trouve ça interessant d’entre prendre conscience. Je ne sais pas si vous êtes tiraillée de votre côté entre 2 identités (papa de Bretagne et maman du Lot-et-Garonne ?). Mais je trouve ça cool d’identifier ce que ces petites facettes de culture apportent à nos vies et comment elles les enrichissent. Voilà, c’est tout pour aujourd’hui !

MES RESSOURCES

ITALIAN STYLE. La journaliste Mode Lise Huret, du site Tendances de Mode, avait publié un décryptage de mon style il y a quelques années. J’y retrouve pas mal de détails très italiens ! À lire ICI.

DEUX AMERICAINES EN ITALIE. Deux idées de lectures bien différentes pour comprendre comment des étrangères se sont habituées au pays. En espérant, un jour, vous raconter aussi ma version !

Il y a la trilogie de Marlena Blasi, 1000 jours à Venise, 1000 jours en Toscane, Un palais à Orvieto. Une série de livres qui m’a profondément marqué à la lecture. Je me rappelle m’être dit que j’adorerais écrire ce genre d’aventures ! Une américaine qui tombe amoureuse d’un vénitien et un nouveau quotidien à 50 ans passés à inventer. Des anecdotes, des incompréhensions, beaucoup d’amour et de vin blanc près du Rialto. ICI

Il y a aussi la journaliste américaine JJ Martin (créatrice de la marque La Double J) qui a écrit un livre « Mamma Milano » mix d’une biographie et d’un beau coffee table book. En voilà une américaine qui s’est italianisée aussi sur beaucoup de choses ! Les milanaises et les florentines sont fort différentes, et cela permet un vrai plongeon dans la bourgeoisie et le cool milanais (le fameux cool dont on parlait plus haut ?). Trop chic, vous choisissez l’imprimé de votre couverture. ICI.

FORTE DEI MARMI. Vous ne comprenez pas le charme de Forte dei Marmi ? J’ai pleuré en lisant l’introduction du livre Assouline sorti l’été dernier. C’EST EXACTEMENT ÇA et qu’on ne vienne pas m’écrire que Forte c’est juste une station pour les riches. Cette personne n’aura certainement pas mangé du cochon sur une table à pique-nique sous des loupiotes dans la campagne juste derrière Forte avec 10 copains. ICI.

Par Ali

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